Louise Browne

Louise est née une nuit d'hiver de février 1895 dans la maisonnée Blackwood. Son père, Joseph Browne, est le majordome de la famille, tout comme l'était son père avant lui, et le père de celui-ci encore avant. Sa mère était Chanel Browne, née Grey, la chef cuisinière de la demeure. L'accouchement fut compliqué et se passa dans la douleur, la petite fille n'étant visiblement pas pressée de venir au monde. Ses parents, déjà attristés par deux fausses couches et un enfant mort-né virent enfin leurs prières s'exaucer.

Ses parents occupant les postes les plus importants de la domesticité Blackwood, Louise n'eut pas une enfance reposante. Ainsi, encore en couche, elle roulait la pâte qui servirait à faire du pain du mieux qu'elle pouvait pendant que sa mère était affairée au petit déjeuner, avant d'être assignée au pressage des oranges et mixage de la pâte à pancakes. Lorsqu'elle put marcher, son père l'envoyait assister le jardinier pour ratisser les feuilles, ou l'homme à tout faire, qui trouvait en elle une aide précieuse pour s'engouffrer dans les recoins les plus étroits, comme pour ramoner une cheminée ou derrière les chaudières pour y poser des pièges à rats.

Estimant qu'elle était devenue suffisamment débrouillarde, elle fut assignée vers l'âge de quatorze ans au service d'Eugénie Blackwood, d'un an plus jeune qu'elle. Elle devait l'aider à s'habiller le matin, ainsi que la laver et jouer avec elle. C'est par son intermédiaire que Louise eut accès à un minimum d'éducation, grâce aux leçons dispensées par un précepteur auquel elle était parfois conviée pour accompagner sa très jeune maîtresse. Louise ne s'y montrait pas très assidue ou même intéressée, mais elle apprit tout de même à compter et à lire (lentement, avec difficultés).

La jeune fille montra fille une dévotion et des compétences toute particulière dans son domaine, en dépit de sa personnalité quelque peu contrariante. C'est pour cela qu'à dix-huit ans, lorsque Lady Rose Hastings arriva au domaine Blackwood, elle fut assignée à son service. Il était voulu que la nouvelle arrivante puisse jouir des meilleurs domestiques des Blackwood, Louise apprit alors les différents sens que ce terme pouvait avoir.

Elle ne resta guère longtemps à son service particulier. Lorsque Lady Hasting retourna chez elle, Louise n'eut d'autre choix de la suivre que pour apprendre qu'elle changeait à nouveau de maitresse, pour entrer au service de sa cadette, la jeune Lady Violet Hasting. Pour Louise, c'était une régression sociale, mais peu lui importait. Être au service d'une femme ou d'une autre, c'était toujours la même travail, les mêmes contraintes. Elle continua de faire son office parfaitement, mais non sans un mot. Sur ce point, Lady Violet était bien plus satisfaite de sa nouvelle femme de chambre que son ainée.